Pour ne prendre que les seuls véhicules portant la vignette « noire », Crit’Air 5, l’interdiction impacte environ 1 véhicule sur 13, soit 7,95 % du parc roulant, au sein du périmètre formé par l'A86. Mais cette moyenne cache de fortes disparités entre les communes - des cartographies permettant de comparer le taux de pauvreté des communes et l’ampleur du parc couvert pas les différentes interdictions mettent en évidence la corrélation entre fragilité économique et qualité des équipements.

Le CNPA estime indispensable de veiller à ce que les dispositifs de restriction de circulation ne produisent pas des effets d’exclusion. Mieux vaut une politique globale, progressive et cohérente, sans diviser les Français, ni accentuer les fractures économiques, sociales et territoriales.

Le CNPA regrette la mise en place unilatérale de mesures aussi restrictives, sans étude d’impact préalable ni concertation avec les acteurs de la filière. Les mesures entrent en vigueur avant même la réalisation d’analyses scientifiques : évoquée en mars 2018 lors d’une réunion sur l’avenir de la filière automobile, le Gouvernement a seulement confirmé la semaine dernière le lancement, à la mi-juillet, d’une étude sur les émissions des véhicules thermiques. Le CNPA s’interroge sur un lancement aussi tardif, alors que la ZFE est déjà mise en place en région francilienne, et que le projet de loi d’Orientation des Mobilités, qui devrait être adopté en juillet, consacre la création des ZFE et des mesures de restriction de circulation, ainsi que la fin des ventes de véhicules thermiques en 2040.

Le CNPA escompte que cette étude permette de trancher l’opportunité de classer les véhicules diesel récents en Crit’Air 1. Sur ce point, il apparaît incohérent que les vignettes Crit’Air se fondent, encore, sur l’âge et la motorisation des véhicules, au lieu des émissions réelles des véhicules.

De même, la simultanéité de l’entrée en vigueur de l’amélioration du contrôle pollution des Diesel au 1er juillet 2019 et de ces mesures d’interdiction ajoute à la confusion, là où il est indispensable d’augmenter de manière significative leur acceptabilité. La nouvelle réglementation, favorisant la lutte contre la pollution, permettra aux centres de contrôle technique de repérer les véhicules émettant davantage de particules fines que la limite autorisée, et de maintenir un parc automobile qui soit à la fois respectueux des normes de sécurité routière et environnementales.

Le CNPA tient à rappeler qu’il a signé en mai 2018, sous l’égide de la PFA avec l’Etat, un Contrat stratégique de filière pour 5 ans, qui consacre des objectifs ambitieux basés sur quelques principes essentiels : 1) la neutralité technologique, laissant les constructeurs et les équipementiers atteindre les objectifs fixés par les pouvoirs publics ; 2) une visibilité à 5 ans pour les aides octroyées au renouvellement du parc roulant ; 3) le respect d’un délai de 5 ans entre l’adoption d’une nouvelle norme environnementale applicable et son entrée effective sur le terrain.

Le CNPA déplore, au regard des dernières mesures adoptées, que les grands principes régissant le Contrat stratégique de filière, promouvant réalisme et lisibilité tant pour les acteurs de la filière automobile que pour les automobilistes, ne soient aujourd’hui pas respectés.

Il s’agit d’un enjeu majeur dans un contexte où les émissions automobiles de CO2 en Europe continuent d’augmenter, alors même que les ventes de véhicules diesel chutent. Une situation qui rend l’objectif de 95g/km d’ici 2021 quasiment hors de portée, faisant peser le risque d’un accident économique et social majeur avec la perspective de pénalités financières qui se répercuteront sur l’ensemble de la filière tout en grevant sa compétitivité.

Le CNPA rappelle qu’il est primordial d’avoir un débat d’experts apaisé, tout particulièrement sur la politique menée sur les énergies. Pour être acceptables et ne pas être en décalage, les politiques publiques doivent être accompagnées, mais aussi anticipées avec tous les acteurs de l’écosystème, afin d’éviter la crispation de marchés sensibles et l’incompréhension des consommateurs soumis à des signaux anxiogènes, parfois contradictoires.

Le CNPA exhorte les pouvoirs publics à une stratégie globale et massive, à la hauteur des transformations que la filière opère pour relever les défis environnementaux et sanitaires, tout en conservant valeur ajoutée et emplois sur le sol national. Les transformations sont complexes, leur coût est élevé, et les acteurs ont besoin, plus que jamais, de lisibilité.

Dans ce contexte, le CNPA a sollicité auprès des ministres Bruno Le Maire et Agnès Pannier-Runacher une réunion, dans la perspective du prochain Conseil stratégique de filière, le 12 juillet prochain. De même, le CNPA s’apprête à rencontrer les principales têtes de listes, en vue des élections municipales, dans les grandes villes.